[Logement] Réformer la fiscalité locale ?
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En France, la question du foncier est structurelle. « La France est un pays où la rareté du foncier peut être organisée », indique Xavier Timbeau, économiste à l’OFCE.plusieurs leviers sont utilisables pour libérer l’accès au foncier en France : les leviers institutionnel, urbanistique et fiscal.

Après l’institutionnel et l’urbanistique, voici le volet lié à la fiscalité locale. Un levier puissant; mais toujours en suspens.

Levier fiscal

Dans le principe, il conviendrait de réformer la fiscalité foncière en cherchant à taxer la détention plutôt que la transaction sur le foncier, et ce, afin de limiter tous les processus de rétention foncière.

L’objectif est double pour les collectivités ; il s’agit de libérer

  • du foncier
  • de nouvelles ressources pour les budgets locaux.

Pour cela, la réforme de la fiscalité locale devrait se fonder sur le principe de la taxation immédiate de la plus-value. Le principe en cours actuellement est celui de la taxation à la cession dans le cadre des DMTO (Droits de Mutation à Titre Onéreux). A cela s’ajoute l’existence d’abattements fiscaux selon la durée de détention (au-delà de trente ans, l’exonération est totale). Aussi quand un terrain change de statut et gagne en valeur lors d’une modification de PLU, cette valeur nouvelle n’est pas ou peu taxée : l’agriculteur qui a vu son champ devenir constructible a tout intérêt à attendre les abattements fiscaux avant de vendre.

Les DMTO (Droits de Mutation à Titre Onéreux) seraient progressivement remplacés par une Taxe Foncière sur le Patrimoine Bâti basée sur la valeur vénale nette des biens immobiliers, c’est-à-dire sur leur valeur marchande déduite des dettes qui y sont liées.

Aujourd’hui, l’assiette fiscale de la taxe foncière repose sur une grille des valeurs locatives déterminée dans les années 60 et 70, la VLC70 (Valeur locative cadastrale 1970) pour le bâti et la VLC 60 pour le non-bâti. Autant dire que ces valeurs n’ont plus aucun rapport avec la réalité, induisant un fort manque à gagner pour les collectivités locales. D’où l’idée d’une refonte de l’assiette d’imposition sur la base de la valeur vénale (marchande) des biens concernés : le prix du marché tient compte de la demande, de la situation, des investissements d’infrastructures et de desserte consacrés par la collectivité… La prise en compte de ses fluctuations annuelles permettrait d’établir une taxation régulière et progressive de la plus-value, réelle et indolore.

Elle permettrait :

  • de réduire le montant de la taxe versée par les primo-accédants : en basant l’impôt sur la valeur marchande nette de ses dettes, elle facilite l’accès et taxe la pleine propriété.
  • de taxer pleinement le patrimoine, une fois celui-ci définitivement acquis.
  • de taxer la plus-value progressivement et non pas à la vente : ce qui permettrait de ne plus inciter à la rétention.
  • de garantir des recettes supplémentaires pour les collectivités locales, réutilisables pour des politiques de densification et de rénovation énergétique de l’habitat.
  • de libérer du foncier tout en prévenant l’étalement urbain : la taxation à la cession cumulée au régime actuel d’abattements conduisait à sur-dimensionnement des zones à urbaniser ; dans une optique à peine dissimulée de captation de la rente foncière.

Les réformes initiées par Cécile Duflot n’ont pour l’instant joué que sur les deux premiers volets, institutionnel et urbanistique. Le volet fiscal est encore en attente du « grand soir fiscal » promis à chaque élection.

[A suivre]