Air : une politique de fond s’impose
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Le 9 avril dernier, le conseil syndical du SMTC de Clermont-Ferrand a voté la délégation à son président pour décider de la gratuité des transports en commun lors d’une alerte à la pollution ou d’un ‘événement non prévisible et générant des déplacements massifs’. Mesure éminemment symbolique – et seulement symbolique, donc – en pleine accélération des phénomènes de pollution atmosphérique.

Les pics de pollution de l’air deviennent de plus en plus fréquents. A Clermont comme ailleurs. Par exemple sur l’Île-de-France, un nouveau a eu lieu le 10 avril, après celui du 13 décembre 2013 (8 jours d’affilée), du 5 mars (14 jours d’affilée), du 27 mars (3 jours), du 31 mars (2 jours)…

Mais c’est en dehors des pics de pollution qu’il faut parler de la pollution de l’air, car en fait, la pollution chronique de l’air augmente. Il faut agir maintenant, sans attendre le prochain et inéluctable pic.

Les écologistes ont beau parler de prévention depuis des années, le soufflet de l’intérêt politique pour la chose retombe lorsque cesse le battage médiatique des pics de pollution, notamment parisienne.

Les mesures structurelles n’étant pas décidées, le phénomène ne cesse d’accélérer sa progression.

Pire encore, au nom du refus d’une écologie qui serait « punitive », on réduit les moyens de lutte contre une pollution qui l’est dans des proportions bien plus graves encore.

Après une série d’épisodes de forte pollution atmosphérique sur la région parisienne et le nord de la France, le gouvernement vient de décider abruptement de diminuer de 15 % le budget d’Airparif (soit 240 000 euros), l’organisme de surveillance de la qualité de l’air, principal outil de surveillance de l’air en région parisienne, Airparif. Pour rappel, la pollution atmosphérique reste la première cause de mortalité environnementale dans le monde et la première préoccupation sanitaire des Franciliens, rappelle Jean-Félix Bernard, le président d’Airparif.

On dénombre de nombreuses maladies imputées à la pollution : affections respiratoires, asthme, irritations oculaires, problème cardiaque, baisse des défenses de l’organisme, cancers…D’après l’OMS, l’impact de ces pollutions sur la santé des citoyens européens en 2000 était une perte de neuf mois d’espérance de vie. La Commission européenne estime à près de 300 000 le nombre de décès anticipés sur la même période.

Des causes diverses, une politique globale

L’air que nous respirons lors de ces pics et entre ces pics a tout du kit de petit chimiste. Un peu d’oxyde d’azote qui forme de l’acide nitrique ; du dioxyde de soufre qui donne de l’acide sulfurique. De l’ammoniac pour obtenir du nitrate d’ammonium et du sulfate d’ammonium.

On a beau incriminer les émissions du trafic automobile, au printemps, une part importante de cette pollution est issue des épandages agricoles. Les molécules issues des traitements ‘préventifs’ en pesticides appliqués par les agriculteurs dès les premiers soleils restent en suspension et finissent par se mélanger aux émanations du trafic routier, du chauffage au fioul et des émissions de charbons. Une réaction chimique se produit et forme du nitrate et du sulfate d’ammonium.

Émissions urbaines, émissions agricoles, causes endogènes et exogènes, autant dire que les mesures prises à chaud lors des pics de pollution ne sont la plupart du temps que des outils de communication et ne s’attaquent en rien aux causes du problème (par exemple, l’un des effets pervers de l’usage fréquent de la circulation alternée est l’achat par les ménages fortunés d’un deuxième véhicule d’occasion à plaque complémentaire au premier). Et puis parce que c’est l’exposition chronique, quotidienne, à un air de mauvaise qualité, hors des pics, qui présente les plus graves conséquences sur la santé.

Quelles solutions ?

  • Donner les mesures de pollution de l’air chaque jour aux journaux télévisés, dans les quotidiens et journaux gratuits, avec un niveau d’exposition médiatique aussi élevé que la météo, les gens doivent savoir quel air ils respirent chaque jour.

  • Interdire l’entrée dans les villes à tout véhicule diesel non équipé de filtre à particules (FAP), ainsi qu’aux modèles anciens dont la liste est à dresser. Notons au passage que les contrôles techniques obligatoires des véhicules laissent aujourd’hui passer des véhicules mal réglés et polluants, ces contrôles devraient être réformés.

  • Accompagner cette interdiction de l’aide à l’achat de véhicules neufs pour les ménages modestes vivant en périphérie et zones rurales, ainsi que d’une organisation de la mobilité adéquate (parking relais à l’orée de la ville où laisser son véhicule pour emprunter des transports en commun qui devront être plus nombreux, plus fréquents, plus fiables, fournissant l’information exacte des heures de départ et d’arrivée).

  • Imposer des normes d’émission de polluants aux véhicules pénétrant dans la zone urbaine pour les livraisons. Organiser la logistique du dernier kilomètre en ville (dossier porté par les écologistes clermontois depuis des années) .

  • Mettre en place l’indemnité kilométrique pour les salariés qui viennent au travail en vélo et développer largement le réseau de pistes cyclables sécurisées, le vélo étant un puissant outil de mobilité dans les villes.

  • Rétablir une TVA à 7 % sur les transports en commun, en revenant sur sa hausse incompréhensible à 10 % en janvier 2014, et renforcer encore et toujours les transports en commun et les solutions de déplacements partagés comme l’auto-partage, le covoiturage et les solutions de systèmes d’information les facilitant. Il faut absolument conforter et mettre en place l’Ecotaxe.

  • Enfin et surtout, objectifs de plus long terme demandant une volonté politique forte,

lutter sans répit contre l’étalement urbain, l’éloignement des lotissements d’habitation des centres d’emploi, la spécialisation des territoires qui génère de longues transhumances entre maison et travail jour après jour.

organiser le dialogue et la coopération entre territoires urbains et ruraux pour la double préservation de l’agriculture et de l’environnement, en pariant sur le dispositif : réduction des pollutions / soutien et dynamisation d’une agriculture de qualité (cela vaut tant pour l’eau que pour l’air). Les bouleversements apportés par la future loi Notre doivent aussi s’envisager dans ce sens.

Données : Reporterre