[TE] Vers l’économie circulaire
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En prenant connaissance du métabolisme d’un territoire, on acquiert la connaissance des flux de matière, d’énergie et de liquidité (monnaie) qui entrent et sortent sur ce territoire. Et donc une évaluation de l’indépendance / dépendance de ce territoire par rapport au reste du monde : le territoire, son économie et ses emplois dépendent-il de flux monétaires venus de l’extérieur (redistribution, dotations, pensions, solidarité nationale, investissements…)?

La vie économique d’un territoire dépend-elle de sources d’énergie venues de l’extérieur ? Et donc de flux monétaires quittant ce territoire ? Ces flux monétaires sortants ne seraient-ils pas mieux utilisés sur le territoire en question pour

– diminuer les consommations énergétiques (et donc la dépendance extérieure, la fragilité du territoire aux crises externes)

– redécouvrir les énergies locales

– intensifier l’activité économique locale en emplois ?

Limiter les besoins (sobriété), les pertes (efficacité), et favoriser les énergies renouvelables à l’échelle d’un territoire, c’est rabattre des flux monétaires sortants sur le développement du territoire ; c’est donc mettre en œuvre un principe d’économie circulaire : réinvestir une partie des flux sortants (monétaires, matériels et énergétiques) sur ce territoire.

Le développement d’un écosystème industriel et économique local permet donc de :
– Limiter les gaspillages
– Favoriser les circuits courts
– Limiter la portée des chocs économiques externes
– Intensifier le développement local en emplois locaux et durables

 

Synergies entre acteurs économiques

Tirer le meilleur parti des principaux flux de matières et d’énergie d’un territoire peut consister à favoriser les synergies entre acteurs économiques : par exemple, les déchets d’une entreprise (matière, chaleur…) peuvent servir de matière première à une autre.

  • L’intérêt est d’ordre économique pour les entreprises
  • et d’ordre environnemental pour le territoire (préservation des ressources).

Cette idée d’un écosystème industriel à l’échelle d’un territoire débouche sur l’écologie dite industrielle ou circulaire. A l’échelle d’un territoire, on parle d’écologie territoriale.
Concrètement, une telle organisation peut s’initier via un espace de dialogue et d’échanges entre les acteurs économiques et institutionnels locaux (tel le Club Energie-Climat de la communauté d’agglomération clermontoise), afin

  • de faciliter leur auto-organisation
  • d’évaluer les bénéfices économiques, sociaux et environnementaux engendrés par les synergies potentielles.

Ex : le département de l’Aube est à l’origine d’une structure associative, Le Club d’écologie industrielle de l’Aube, regroupant le conseil général, une université et des entreprises pour explorer des projets territoriaux d’écologie industrielle.
Le Canton de Genève s’est, quant à lui, lancé dans la démarche Ecomat avec l’ambition d’une réutilisation maximale des déchets du secteur de la construction. Ce territoire est en effet confronté à une raréfaction des ressources en gravier comme à un problème de gestion des déchets de démolition et d’excavation.

Au printemps dernier, a été lancé l’Institut de l’économie circulaire, présidé par le député Europe Écologie les Verts, François-Michel Lambert : son objectif est de préparer la France à une mutation de son appareil productif vers des processus circulaires. Le constat étant que le modèle linéaire extraire – fabriquer – consommer – jeter fait face à une impasse majeure avec la raréfaction des ressources et la quantité de déchets produits.

Comment, dès lors, orienter les investissements vers une économie plus circulaire, moins dévoreuse d’énergie et de matière, en rupture avec les stratégies d’obsolescence accélérée, de gaspillage généralisé, une économie moins tournée vers la propriété que vers l’accès et l’usage durables (économie de la fonctionnalité) ?

Comment s’orienter vers une économie qui, à une échelle pertinente, forcément territoriale, vise à faire mieux correspondre offre et demande (dans le respect des trois principes de sobriété, efficacité et renouvelables) ?

Comment faire de nos économies locales, des systèmes intensément écologiques, intense en emplois locaux, intense en utilisation de ressources locales renouvelables (et donc préservées), intensément efficaces à tous les niveaux ?

Comment faire passer nos économies du seul objectif de performance compétitive à celui de résilience durable ?

 

Faire correspondre la demande et l’offre locale d’énergie

Au-delà de la seule industrie, la maîtrise locale des réseaux d’énergie permet une adéquation locale des productions et consommations d’énergie (Voir ICI).

Cela vaut aussi pour la chaleur et le froid pour lesquels la réalisation d’un plan chaleur local peut s’avérer déterminant.
Les besoins en chaleur et en froid sont plus importants que les besoins en électricité. Des sources de chaleur sont disponibles de façon diffuse sur tous les territoires :  cogénération, usine d’incinération, excédent de chaleur fatale industrielle, eaux usées, groupes frigorifiques, data center… Et puis des sources de chaleur basse température : rivière, lac, mer… Il s’agit alors de recenser les besoins et les potentiels disponibles afin de rapprocher l’offre et la demande : ainsi des ressources en chaleur peuvent être ignorées alors qu’à quelques pas de là, de l’énergie est gaspillée pour en produire. Un plan chaleur territorial doit permettre de confronter ressources et besoins et de peser sur les décisions d’urbanisme.

Enfin, la réutilisation des déchets organiques d’un territoire donné peut conduire à la mise en oeuvre d’un plan territorial de méthanisation. Le méthane ainsi produit permettant d’alimenter des centrales en cogénération (chaleur et électricité).

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Penser un territoire selon les principes d’un organisme permet d’en rendre la vie et le développement durable, renouvelable, d’en accroître la résilience aux chocs économiques, sociaux et écologiques externes et de contribuer à sa croissance, notamment en termes d’emplois, locaux et non délocalisables. On parle souvent de relocalisation de l’économie : l’économie circulaire et le circuit court nous apprennent que cette relocalisation commence par la transformation de nos dépenses inutiles en investissements d’avenir sur nos territoires. Comme, par exemple, la transformation de dépenses énergétiques démesurées en investissement dans la rénovation thermique des logements.

Mais comment transformer le plomb en or en matière énergétique ? Car telle est finalement la question qui conditionne la faisabilité de toute la transition.

[A suivre…]