STEP des 3 rivières : le casse-tête de l’épandage des boues
Partager

Dans le cadre de l’enquête publique relative à l’épandage des boues issues de la Station d’Epuration des 3 rivières dans l’agglomération de Clermont-Ferrand, le groupe des élus écologistes de Clermont-ferrand et de son agglomération ont fait parvenir un certain nombre de remarques au Commissaire enquêteur.

a- La STEP des 3 rivières traite les eaux usées de 19 communes, recevant indifféremment les eaux usées des particuliers et des établissements industriels et hospitaliers.

Certains de ces établissements n’ont pas de convention de rejet avec la collectivité, et la plupart n’effectuent pas d’autosurveillance.

Un préalable nécessaire à la garantie de la qualité des eaux usées et donc des boues de STEP devrait être une obligation d’autosurveillance de leurs rejets par l’ensemble des établissements industriels et hospitaliers.

b- Dans l’étude menée par l’INRA, le CNRS et l’Irstea sur les effets agronomiques et environnementaux de l’épandage des matières fertilisantes d’origine résiduaire sur les terres agricoles et les forêts (résultats présentés le 3 Juillet 2014), on peut noter que :

  • les boues sont susceptibles de véhiculer des agents biologiques pathogènes et de participer à la dissémination de l’antibiorésistance.
  • les boues présentent un risque de contamination des sols par des contaminants organiques et minéraux.
  • de nombreuses zones d’ombre demeurent en particulier sur l’évaluation sanitaire de cette filière.

Le réemploi des boues est donc encore très contesté scientifiquement et le simple respect des normes actuelles ne vaut pas garantie absolue.

c- Le cahier des charges « fertilisants et supports de culture » de l’ Agriculture Biologique interdit les boues de STEP. Il en est de même pour des productions de l’agriculture conventionnelle Label Rouge ou filières qualité telles que la filière de la graine au pain (partenariat Limagrain). Il y a incompatibilité entre la volonté de doublement des surfaces agricoles biologiques d’ici 2017 et la pratique de l’épandage des boues de STEP.

De plus, économiquement cette pratique viendrait s’opposer au programme de développement de l’agriculture biologique voté par le Conseil Régional d’Auvergne (1,52 M€).

Aussi l’épandage ne nous paraît pas être une solution pérenne dans la perspective du développement de l’agriculture biologique dans notre région.

d- L’épandage des boues de STEP présente un risque de pollution de l’eau des sources, rivières et nappes souterraines, remettant en question les mesures de prévention élaborées dans le cadre des SAGE Dore, Allier et Alagnon afin d’arriver à l’obtention d’une bonne qualité des eaux. En effet, les polluants résiduaires des boues ainsi que les fortes concentrations en nitrate et phosphore affecteront finalement le cycle de l’eau en cas de fortes pluies et de lessivage des sols.

Pour l’ensemble de ces quatre raisons, les élus écologistes de Clermont-Ferrand posent un certain nombre de conditions à une politique d’épandage :

1- Inciter les citoyens à la réduction des produits polluants qu’ils rejettent dans les eaux usées

2- Approfondir les analyses de boues de STEP et revoir le seuil des normes qui régissent ces analyses,

3- Promouvoir des techniques de filtration innovantes et plus poussées, dont la phytofiltration afin de retenir un maximum de substances toxiques.

4- Mettre en place une politique communautaire de police des branchements d’eaux usées efficace afin de réduire les rejets polluants indésirables dans les réseaux d’assainissement. Actuellement cette compétence est communale. Dans le même temps, définir des normes relatives à l’autosurveillance et à la communication des données que devrait réaliser l’ensemble des établissements publics et privés sur le territoire.

5- Porter un projet de méthaniseur où seraient traitées les boues : le méthaniseur permettrait d’extraire de l’énergie sous forme de biogaz et de produire un digestat exploitable pour la double production d’azote et de phosphore (matière aujourd’hui importée et absolument nécessaire à la croissance des végétaux).

6- Prévoir enfin un mode de traitement optimal du reliquat toxique (hors azote et phosphore).

En l’état actuel des choses, les conditions ne sont donc pas réunies pour opter pour un traitement des boues de STEP par épandage en agriculture.


Pour aller plus loin : La pollution des eaux, quels défis ?


Pollution de l’eau, quels défis ? par universcience-lemonde