La loi sur le logement, véritable soutien au pouvoir d’achat des Français
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L’Assemblée nationale vient de voter en septembre, en première lecture, le projet de loi pour l’accès au logement et à un urbanisme rénové (Alur), dont les deux mesures-clés, la garantie universelle des loyers (GUL) et l’encadrement de ces derniers, suscitent des réactions, notamment des professionnels.

Une chose est certaine, la mise en œuvre de ces dispositifs aura des conséquences positives non négligeables pour le pouvoir d’achat de nombreux français, et nous devons nous en réjouir.

– Par Eva Sas, députée EELV de l’Essonne.

 

Le logement, poste principal de dépense des français

Premier constat, jamais les français n’ont eu autant de difficultés à payer leur loyer et avoir accès à un logement et ce pour plusieurs raisons : forte augmentation des prix, pénurie de logements, baisse du pouvoir d’achat etc. La crise du logement est devenue une réalité incontournable en France.

Deuxième constat, le logement est une dépense de première nécessité, représentant une part conséquente du budget des ménages. En 2010, en incluant le loyer et les charges annexes (taxes, remboursements d’emprunts, dépenses d’eau et d’énergie) un ménage sur deux consacre plus de 18,5 % de ses revenus à son habitation principale. Plus révélateur encore, 19 % des ménages locataires du secteur privé dépensent 40 % de ses revenus pour se loger[1]. Ce taux d’effort très élevé est déterminant pour comprendre la genèse de la loi Alur et l’impact qu’elle pourra avoir sur le pouvoir d’achat des français.

 

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Accordons nous donc sur ce point : il était grand temps d’agir pour faire évoluer cette situation qui plonge nombre de français dans des situations de précarité intolérables.

 

L’encadrement des loyers, une mesure juste et libératrice de pouvoir d’achat

Alors que l’année 2012 a été marquée par une baisse historique du pouvoir d’achat des ménages (-0,4 % sur l’année), la loi Alur vient instaurer un dispositif durable et stable afin de contenir la progression des loyers et libérer du pouvoir d’achat aux français en agissant directement sur une dépense aussi contrainte que le logement.

Concrètement, ce dispositif d’encadrement prévoit que les loyers ne pourront excéder de plus de 20 % un loyer « médian », calculé grâce aux données collectées par des observatoires locaux des loyers (OLL)[2] actuellement en construction, dans les 28 agglomérations de plus de 50 000 habitants[3] où le marché de la location est tendu. Seuls les logements présentant des caractéristiques exceptionnelles (emplacement, confort), qui devront être justifiées dans le bail, pourront déroger à ce plafond.

La définition ainsi faite du périmètre permettra l’observation de 4,6 millions de logements, soit 70 % du parc de logements locatifs privés. Sur tous les territoires concernés, l’entrée en vigueur de la loi impliquera une baisse du niveau des loyers, dans la mesure où tous les loyers situés au-dessus du loyer médian de référence majoré auront vocation à être abaissés pour être ramenés dans la fourchette de fixation libre des loyers.

Dans cette optique, il est dès à présent aisé de calculer l’impact que le mécanisme aurait s’il était appliqué dans l’agglomération parisienne, qui bénéficie déjà de la base de données de l’Observatoire des loyers de l’agglomération parisienne (Olap). D’après ces données de l’Olap, 26,5 % des biens mis en location en 2012 en région parisienne affichent un loyer supérieur au loyer médian majoré au niveau maximum de 20 % et pourraient donc être concernés par l’encadrement.

Cette mesure ne sera pas une « exception » à la française, les loyers étant encadrés dans d’autres pays européens. C’est le cas en Allemagne ou en Suède. Ainsi, en 2012, à Munich, ville allemande où le prix des logements est le plus élevé, les loyers s’établissaient en moyenne à 9 €/m2 alors qu’ils s’élevaient à 24 €/m2 à Paris, et à près de 18 €/m² en Île-de-France.

Ces loyers très élevés sont la résultante d’un marché livré à lui-même depuis des années. En créant dans la loi un mécanisme d’encadrement des loyers, le Gouvernement va pouvoir éliminer les excès, contenir une évolution des prix supportable et protéger le budget des français.

D’autre part, le projet de loi va également rééquilibrer la répartition des charges et prévoit donc notamment que le propriétaire prenne en charge la totalité des frais liés à la mise en location de son bien, à l’exception de deux prestations, qui bénéficient à l’ensemble des parties et dont la prise en charge sera donc partagée entre bailleur et locataire : la réalisation de l’état des lieux et la rédaction du bail.

 

Un arsenal législatif sécurisant pour les propriétaires

Ce projet de loi n’avait toutefois pas pour essence la hausse du pouvoir d’achat, mais plutôt la régulation d’un « marché pas comme les autres ». La régulation ira alors de pair avec la protection. Le projet de loi prévoit l’instauration d’une garantie universelle des loyers (Gul) destinée à protéger les propriétaires contre le risque d’impayés, encourager la mise en location de logements vacants et faciliter l’entrée des locataires dans le logement, tout en protégeant les locataires en cas de perte d’emploi, perte de revenues, tout ce qu’on appelle les « risques de vie ».

Le dispositif prévu est simple et constitue une véritable sécurité pour les propriétaires. Un bailleur confronté à une situation d’impayé se verra rapidement indemnisé. Si le locataire subit des difficultés ponctuelles liées à une rupture sociale, économique, familiale, un accompagnement sera rapidement mis en place. Et si l’impayé de loyers est lié au comportement abusif de la part d’un locataire indélicat, la Gul se retournera contre lui et lancera rapidement des procédures de recouvrement forcé.

Quid de la charge de cette « assurance » ? La garantie, évaluée à 1,8 % du loyer, sera répartie à parts égales entre les deux parties, mesure fidèle à l’esprit de la loi : apaiser les rapports au sein du couple propriétaire-locataire.

Outre la plus grande protection qui sera offerte aux consommateurs, cette loi a, en effet, l’ambition d’instaurer un statut plus cohérent pour les professions de l’immobilier. Ces professions constituent par ailleurs un secteur économique important de notre pays, producteur de valeur ajoutée et d’emplois. Alors que les professionnels immobiliers proposent un service essentiel, le développement de certaines pratiques abusives a contribué à dégrader l’image de l’intermédiaire et a pesé sur le dynamisme du secteur.

Ces mesures favoriseront les agences et les propriétaires scrupuleux face au respect des droits des consommateurs et amèneront un plus grand nombre de français vers la location privée, corollaire déterminant à la « bonne santé » du marché de l’immobilier.

 

Conclusion. La politique du logement et de l’immobilier s’est trop longtemps fondée sur la certitude qu’il s’agissait d’un marché comme un autre et que sa dérégulation permettrait son équilibre. Or, force est de constater que ce n’est pas le cas pour deux raisons : le logement est un bien de première nécessité et le déséquilibre entre l’offre et la demande actuel condamne le locataire à payer toujours plus cher. Le projet de loi Alur permet enfin d’aborder les questions de logement dans un esprit de justice sociale en mettant en place l’encadrement des loyers et la Gul. Elle permet également des avancées significatives sur d’autres sujets primordiaux, tels que le développement de formes d’habitat alternatives, l’introduction de plus de transparence dans les critères d’attribution de logements sociaux, la lutte contre l’habitat indigne et la modernisation des règles d’urbanisme. En résumé, une loi fondatrice pour un sujet central dans le quotidien des français.

 


[1] Chiffres de l’INSEE : http://www.insee.fr/fr/ffc/ipweb/ip1395/ip1395.pdf

[2] En décembre 2012, une première phase de mise en place a été engagée sur 19 sites pilotes, répartis sur l’ensemble du territoire et qui vont permettre d’observer un parc d’environ 2,6 millions de logements, soit près de 40 % du parc locatif privé.

[3] Elles correspondent aux où existe un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements et soumises à ce titre à la taxe sur les logements vacants : Ajaccio, Annecy, Arles, Bastia, Bayonne, Beauvais, Bordeaux, Draguignan, Fréjus, Genève-Annemasse, Grenoble, La Rochelle, La Teste-de-Buch – Arcachon, Lille, Lyon, Marseille – Aix-en-Provence, Meaux, Menton – Monaco, Montpellier, Nantes, Nice, Paris, Saint-Nazaire, Sète, Strasbourg, Thonon-les-Bains, Toulon, Toulouse.