Déchets 63 : un plan pour presque rien
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Les élus écologistes de Clermont-Ferrand se sont toujours mobilisés en faveur d’une politique ambitieuse de réduction, de collecte et de traitement des déchets, politique alternative à celle centrée sur l’incinérateur de Clermont-Ferrand.
Sans surprise, moins de dix mois après la mise en service de cet équipement, le projet de plan départemental de prévention et de gestion des déchets est tout entier construit autour des 150 000 tonnes de capacité annuelle d’incinération. Derrière quelques effets sémantiques et statistiques, ce document n’apparaît donc pas adapté à la situation ni de l’agglomération clermontoise ni du département en matière de déchets, tant dans sa conception et sa philosophie que dans ses ambitions ou ses moyens et portées juridiques.

I- Une philosophie dépassée
Malgré l’appellation de ce plan dit de « prévention » et les mesures qu’il contient,
malgré une époque qui est tout autre, où des collectivités sans cesse plus nombreuses se fixent le cap du « Zero waste »,
où une métropole telle que San Francisco envisage le zéro déchets d’ici 2020,
le plan proposé pour le Puy-de-Dôme à l’horizon 2025 repose plus sur l’élimination et la dissimulation que sur la valorisation durable des déchets non dangereux. La finalité sous-jacente à ce plan est plus de faire disparaître le déchet que de le réemployer. Il passe à côté de l’opportunité écologique, économique et sociale que représentent les déchets.


L’objectif central de ce plan se tient donc dans la limitation apparemment drastique du volume d’enfouissement autour des capacités de l’incinérateur. D’un point de vue strictement numérique, les objectifs semblent atteints : il y est prévu de passer de 316 500 tonnes enfouies en 2010 à moins de 54 000 tonnes en 2025.
Si la réduction est conséquente, elle a un prix : celui de 150 000 tonnes de déchets incinérés. Le « miracle » de l’incinération est de faire partir en fumée des centaines de milliers de tonnes de déchets. En effet, l’incinérateur assure :
– une réduction du volume des déchets (de près de 90%) ; on parle de ‘perte totale’.
– ainsi qu’une masse résiduelle de 25 à 33 % de la masse de départ : ce sont les résidus de combustion, principalement les mâchefers. Ils constituent une masse de 37 000 (25 % de résidus soit 32 500 t de mâchefers + 4500 t de métaux ferreux et non ferreux) à 50 000 tonnes (33 % de résidus soit 43 900 t de mâchefers + 6,1t de métaux). Destinés à être utilisés en sous-couche routière, les mâchefers sont miraculeusement évacués du bilan de ce plan.

Habillage statistique

Interdits dans de nombreux départements en technique routière pour risque de pollution des sols et des eaux (relargage de métaux lourds et de molécules toxiques), leur élimination comptable permet le bilan flatteur de l’incinération en termes de quantités résiduelles à enfouir.
Une fois cette masse résiduelle de la combustion réintégrée au bilan, le « rendement » de l’incinération en termes de réduction des tonnages à enfouir par rapport à une politique ambitieuse de détournement s’effondre.

Bilan alternatif

En effet, les écologistes parient sur un détournement plus marqué des DMA (Déchets Ménagers et Assimilés) ; de l’ordre de 80 % (au lieu des 55 % envisagés dans ce plan par rapport aux 38 % actuels).
Sur le plan strictement comptable, cela nous donnerait 317 000 tonnes de DMA en 2025, dont 253 840 tonnes détournées et 63 460 tonnes enfouies.
En y ajoutant les 61 000 tonnes de DAE (Déchets d’Activités Économiques ; un gisement d’ailleurs appelé à baisser, si une politique ambitieuse de réduction et de prévention des déchets d’origine économique est initiée), on parvient à environ 124 000 tonnes de déchets à enfouir.

Dans le scénario retenu par ce plan, on retient 54 000 tonnes de résidus à enfouir + 37 000 ou 50 000 tonnes de masse résiduelle (après incinération), soit une fourchette allant de 91 000 tonnes à 104 000 tonnes.

Entre les deux scénarii (détournement / incinération), le différentiel s’établit dans une fourchette de 20 à 30 000 tonnes qui représentent de 2 à 3 % du volume total de déchets à traiter prévu en 2025 (1 117 300 t). Mais ce bilan quantitatif de l’incinérateur est-il satisfaisant si on le rapporte aux bilans financier / économique, social et environnemental ?

– A suivre