Une agriculture dans l’impasse
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Les agriculteurs manifestent aujourd’hui un peu partout en France pour faire entendre leur colère quant à la hausse des charges et des contraintes, notamment sociales et environnementales. Encore une fois, l’écologie est prise à parti dans une opposition qui masque les vrais défis et les véritables menaces pesant sur le monde agricole français.

« Ces derniers mois, la « colère des agriculteurs » a souvent fait la Une, déclare la Confédération Paysanne. Cette colère est véritable, profonde, justifiée. Mais il faut simplement s’en prendre aux vrais responsables. […]

Nous sommes dans un système à bout de souffle qui n’a d’égard que pour la compétition et la rentabilité. Ceux qui nous gouvernent avancent main dans la main avec ceux qui se croient autorisés à parler pour nous. Ils poursuivent le long travail conduisant à la disparition programmée des paysans, et le transfert de nos compétences aux industriels et aux financiers. »

En effet, opposer élevage et écologie consiste à masquer les véritables causes de la crise agricole : industrialisation, mondialisation et massification du secteur dont ne profite qu’une infime partie de l’agriculture française, la même

qui tient les rênes du syndicalisme majoritaire

qui tire à boulets rouges sur les « djidhadistes verts » (dixit Xavier Beulin, président de la FNSEA, syndicat majoritaire)

qui appelle à consommer français en soutenant l’industrialisation et la globalisation des marchés agricoles

et qui dénonce l’Europe, tout en profitant largement des aides qu’elle prodigue.

S’en prendre aux vrais responsables, c’est s’attaquer aux questions posées par un modèle agricole, industriel et productif qui épuise la biosphère et les ressources – l’eau, les sols et la biodiversité.

C’est s’interroger aussi sur les contradictions et les impasses d’un système qui, non content d’épuiser et de raréfier les ressources, n’envisage de solution que dans une exploitation et un épuisement accrus de ces mêmes ressources. Comme lorsque le maïs épuise les nappes phréatiques et qu’il faut construire un barrage pour irriguer plus … et sans doute, gagner plus; sans jamais poser la question de la viabilité et de l’utilité de la culture intensive du maïs.

S’en prendre aux vrais responsables, c’est poser l’objectif d’une agriculture paysanne, intensive en emplois et en ressources naturelles ; c’est renouer avec une agriculture moderne et ‘innovante’ sachant s’adapter aux terroirs par la variété des cultures, des semences et des pratiques culturales (et non pas l’inverse, c’est-à-dire adapter les terroirs aux cultures les plus productives, à grands renforts d’intrants et d’agressions environnementales).

L’avenir est à une agriculture paysanne tournée vers des productions locales et de qualité. Et non dans l’impasse d’un modèle agricole dont les seules perspectives sont le gigantisme, les économies d’échelle et le droit de polluer.