Cécile Duflot : « Le logement est au coeur du pacte républicain »
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Au cœur du pacte républicain, les questions de l’aménagement du territoire, de l’urbanisme et du logement occupent une place particulière parce que la question sociale se présente bien souvent en premier lieu comme une question spatiale. Le cadre de vie s’avère générateur d’inégalités nouvelles, la première étant fréquemment celle de l’accès au logement.

Forte augmentation des prix, pénurie de logements, baisse du pouvoir d’achat des ménages : la crise du logement est devenue une réalité incontournable en France. Des décennies de laisser-faire ont aggravé les difficultés rencontrées par les Françaises et les Français pour se loger et creusé les inégalités. Loin d’être un bien de consommation courante, le logement est une dépense de première nécessité.

Pour rétablir une égalité d’accès au logement, il faut aborder les enjeux économiques, sociaux, écologiques dans une approche globale. Le projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (Alur) est structuré selon trois axes complémentaires, qui marquent la volonté de garantir l’intérêt général: il est porteur d’une démarche de régulation, d’une logique de protection et d’une dynamique d’innovation.

La régulation d’abord. Abandonner au seul marché le choix de société qui découle de la question du logement et de l’immobilier nous a conduits dans un mur que nous avons devant nous actuellement. Depuis trop longtemps la politique du logement et de l’immobilier s’est fondée sur la certitude qu’il s’agissait d’un marché comme un autre et que sa dérégulation permettrait son équilibre.

Cette approche politique a eu au moins trois conséquences néfastes. Tout d’abord l’asymétrie entre l’offre et la demande, censée s’auto-équilibrer par la main invisible du marché, n’a cessé de se creuser. Ensuite, d’un point de vue social, jamais les Français n’ont eu autant de difficulté à payer leur loyer et à avoir accès à un logement. Enfin, et c’est là une faute écologique: des logements ont été construits, mais parfois là où il n’y avait pas de besoin et souvent en consommant des espaces naturels et agricoles. La sortie de crise passe par la voie de la responsabilité et une régulation des loyers, une régulation écologique des constructions, une régulation des professions qui interviennent dans l’immobilier et le logement.

Le deuxième axe, c’est celui de la protection. Propriétaires et locataires doivent être protégés de la violence de la crise. Il faut protéger les plus fragiles, qui, dans une période de grande tension du marché locatif, sont à la merci de tous les abus. C’est pourquoi le gouvernement a souhaité agir avec force face aux marchands de sommeil et propriétaires indélicats.

Il faut aussi chercher à apaiser les relations entre propriétaires et locataires afin que se loger ou louer son bien ne soit plus une épreuve de force mais une étape de vie. Il faut clarifier les règles du jeu. La relation entre propriétaires et locataires ne peut se nouer sur le mode du conflit permanent. Et l’esprit de la garantie universelle des loyers, c’est précisément de protéger à la fois les propriétaires et les locataires contre les risques: il s’agit d’une avancée sociale majeure qui permettra de prévenir les expulsions et de prémunir les propriétaires contre les locataires indélicats.

Enfin, il est du rôle de l’État d’encourager et de soutenir l’expérimentation et l’innovation portées par les habitantes et les habitants. Dans cet esprit, par exemple, l’habitat participatif constitue une manière inédite de se poser la question du logement, il représente une alternative viable, une troisième voie entre le logement individuel et l’habitat collectif.

Le projet de loi Alur est la traduction législative d’une démarche politique de longue haleine, qui puise son inspiration dans les revendications portées des années durant par la société mobilisée pour que les questions de logement soient abordées dans un esprit de justice sociale et que l’urbanisme ne soit pas abandonné à la seule logique de dérégulation.

Cécile Duflot, ministre de l’Égalité des territoires et du Logement.