Européennes : les leçons d’un scrutin (2)
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Autisme politique pour certains, culpabilisation pour d’autres… Si le « choc » du 25 mai 2014 altère quelque peu les capacités de jugement, il va falloir prendre le temps de tirer les leçons de ce scrutin. A tous les niveaux, européen, national et local. Pour tous les partis, à commencer par les forces de gauche et de l’écologie.

Même si dans ce paysage dévasté, les écologistes trouvent les moyens de résister quelque peu, ils sont loin de leur percée de 2009 et essuient, comme les autres forces politiques, cette vague de méfiance, voire de défiance massive des électeurs. En 2009, la liste socialiste menée par Henri Weber (PS) totalisait 5711 suffrages sur notre ville. Le 25 mai dernier, celle conduite par JP Denanot en a récolté 5814.

En 2009, EELV avait profité d’un report des électeurs socialistes. Cela n’est plus le cas.

Il convient de s’interroger sur les raisons d’une telle situation, notamment pour l’écologie politique, pensée comme une voie alternative à gauche. La question reste donc entière de savoir comment faire entendre la petite musique d’une transition écologique conjuguant justice sociale, égalité et rupture avec l’hyperconsumérisme.

Protection et justice sociale

Au terme de ce scrutin, trois remarques s’imposent quant au sens des messages adressés par l’électorat.

1- Ce vote marque une lourde déception par rapport aux attentes et aux promesses de la gauche qui a porté François Hollande au pouvoir en 2012. Ce sentiment génère un phénomène d’abstention qui « ne peut être dissocié d’une méfiance politique », selon la sociologueAnne Muxel, méfiance également porteuse d‘une « connotation protestataire ».

2- Ce résultats portent aussi la marque d’un sentiment d’abandon éprouvé dans les territoires ruraux et provinciaux, dans le prolongement d’un double sentiment d’impuissance et de blocage (quoi que l’on fasse ou dise, rien ne change). Ce sentiment d’abandon engendre une impression de vulnérabilité qui nourrit elle-même une impression d’insécurité généralisée (culturelle, économique, politique…). Au-delà de l’abstention, ces peurs diffuses produisent un vote protestataire qu’incarne le bulletin Front National.

3- Enfin, ce vote exprime également une double demande de protection et d’égalité (sociale, territoriale, culturelle…).

Si les réponses écologistes sont en mesure de répondre à ce double défi, elles répondent à des enjeux matériels précis (crise énergétique, crise alimentaire / agricole…).

Or la double demande protection / égalité ne relève pas de l’ordre strictement matériel, mais avant toute chose, de l’ordre du vécu. Aussi, les réponses, les discours et les propositions écologistes mériteraient-elles sans doute d’être articulées et formulées autrement. A très grands traits :

  • En investissant le besoin de protection via une sorte de « bouclier écologique » comprenant toute la gamme des luttes contre la précarité (logement, énergie/transports, alimentation/ santé…) => une réponse aux urgences pouvant se déployer en politique de long terme orientée vers les transitions.
  • En investissant le besoin d’égalité et de justice via des propositions et des discours tournés vers un objectif de développement autonome et juste, des personnes et des territoires, fondé sur le triptyque Innovation / Ressources / Solidarités : innover pour trouver des ressources et mieux les partager afin d’innover mieux et de trouver des ressources… Et cela, très concrètement, à l’échelon local : l’économie de ressources (énergie) génère des recettes réinvestissables sur le territoire pour la satisfaction de besoins fondamentaux. Il s’agit alors de passer du produire plus, pour gagner plus au produire juste, pour vivre tous.

Ces deux axes de protection et de proximité / rapport au territoire sont des pistes à explorer dans la structuration d’un discours et un programme écologistes en s’appuyant sur les dimensions du vécu qui déterminent bien plus les comportements politiques que les approches techniques et strictement rationnelles.

Il s’agit également de pistes à ouvrir pour l’action locale des élus écologistes. A Clermont-Ferrand notamment – commune et agglomération -, vos élus écologistes sont en charge de secteurs clefs tels que le développement durable, l’énergie, l’eau, l’assainissement et l’habitat. Ils auront à cœur de formuler et d’inscrire leur action dans cette double stratégie de protection et de développement/ émancipation.