Adoption de la loi sur l’économie sociale et solidaire
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Le texte devrait booster un secteur qui représente 10% du PIB et concerne environ 200 000 structures.

Le projet de loi sur l’économie sociale et solidaire (ESS) aura survécu au départ de son concepteur, Benoît Hamon. La version définitive du texte a été adoptée, lundi soir, en commission paritaire à l’Assemblée nationale. En substance, le texte a peu changé depuis le début. Avec lui, le gouvernement tente d’encourager ce secteur de l’économie qui représente déjà 10% du PIB en France et environ 200 000 structures. La mesure, qui vise à favoriser une autre voie pour l’économie, plus juste socialement et plus durable, était défendue par l’ensemble de la gauche au parlement. La droite a voté contre ou s’est abstenue.

Au cabinet de la secrétaire d’Etat à l’ESS Carole Delga, on met en avant une définition claire de l’ESS, «des barrières déterminées» présentées dans l’article 1 du texte. Aux structures historiques (associations, mutuelles et coopératives) vont s’ajouter des sociétés commerciales qui poursuivent, elles aussi, un objectif d’utilité sociale, ont instauré une gouvernance démocratique et réinvestissent la majorité des excédents de gestion dans l’entreprise. L’Assemblée a réintroduit dans le texte un «guide des bonnes pratiques» qui assurera le respect des valeurs de l’ESS. «L’ancien agrément n’était pas clair. Il y avait des effets d’aubaine : des start-ups dans le développement durable couraient après… L’ESS, ce n’est ni de la responsabilité sociale et environnementale, ni du social washing, ni du social business», balance-t-on sans détour.

Le financement facilité

Si la définition de l’économie sociale et solidaire est un sujet sensible, c’est parce que ces structures vont bientôt bénéficier d’un accès aux financements facilité grâce à l’intervention de la Banque publique d’investissement (BPI). Au total, 500 millions d’euros seront réservés à ce secteur. L’ESS aura droit à des produits spécifiques en financement bancaire et en fonds propres : un prêt participatif social et solidaire de petit montant à combiner avec d’autres ressources. Un fonds d’investissement dédié aux coopératives et un fonds de l’innovation sociale, présenté sous forme d’avance remboursable, devrait aussi voir le jour au deuxième semestre 2014. «Nous souhaitons créer un écosystème favorable pour attirer des investisseurs privés. Les acteurs du secteur nous l’ont dit : on veut des fonds propres, sortir de la dépendance aux subventions», précise le ministère.

Favoriser la reprise d’entreprises par les salariés

Benoît Hamon y tenait : la loi sur l’ESS devait permettre de favoriser la reprise des entreprises en difficulté par leurs salariés. La CGPME, organisation patronale des entreprises de taille moyenne, s’y était pourtant vivement opposée. Ce point du texte a connu quelques aménagements. «Mais l’ambition est aussi forte que dans la première version», assure le cabinet de Carole Delga. Un droit d’information préalable des salariés des PME de moins de 250 personnes en cas de cession est créé. Le chef d’entreprise devra présenter le projet de vente au moins deux mois avant. Ensuite, libre à lui d’approuver ou pas la proposition de ses anciens employés. Dans la même veine, un statut de Scop d’amorçage permettra aux salariés qui tenteront l’aventure de gérer l’entreprise en étant minoritaires au capital, le temps de réunir les fonds nécessaires pour devenir majoritaires.

L’élément manquant ? La loi ESS n’a pas gardé ses atours de loi Florange. La première version reprenait l’un des engagement de François Hollande lors de la campagne présidentielle, elle ouvrait la voie à des pénalités pour les entreprises fermant un site rentable comme, selon les syndicats, les hauts-fourneaux de Florange fermés par ArcelorMittal. La mesure a été jugée «contraire à la liberté d’entreprendre» par le Conseil constitutionnel. Reste l’obligation de rechercher un repreneur en cas de projet de fermeture d’un établissement, condition nécessaire pour valider un plan de sauvegarde de l’emploi. Enfin, l’autorité administrative pourra réclamer le remboursement des aides versées à l’entreprise deux ans avant sa fermeture définitive, s’il existait un repreneur. L’économie sociale et solidaire rejoint alors la défense des salariés.

Léa LEJEUNE

– Source : Libération